Biographie de Christian Faison (Un homme debout)

Biographie de Christian Faison (Un homme debout)

Avec le recul, je pense pouvoir affirmer que Christian Faison est l’un des plus grands déclencheurs qui m’ont donné l’envie d’ouvrir ce blog.

C’est lorsque j’ai lu son livre alors que j’avais 17 ans que j’ai compris que certaines histoires, certains destins se devaient d’être connus de tous.

Dans son récit « J’ai dix ans et ma vie est un cauchemar », Christian nous prouve que tout est possible. Il est la preuve vivante que l’humanité peut naitre de l’inhumanité.

 

I/ A l’état brut.

Né le 9 février 1963, à l’hôpital public Hoche à Nimes. Christian Faison naitra sous le signe du Verseau.

Selon moi, ce qui décrit le mieux Christian Faison est l’adjectif « vivant ». Il frôlera la mort plus d’une fois. Pourtant, il saura se relever après chaque chute, emmagasinant à chaque retour à la survie un peu plus d’envie de rencontrer la vie, celle à qui il vouera une passion dévorante.

Hormis sa capacité d’adaptation sans faille, et celle de donner toujours plus d’amour à ceux qui l’entourent, il est difficile de savoir si les traits de caractère de Christian sont bruts ou s’ils ont été dictés par son enfance.

Elève turbulent dans son enfance, il deviendra ensuite effacé, manquant cruellement de confiance en lui.

De nature optimiste, il espère pourtant une vie meilleure. Mais en attendant que la roue tourne, il profitera de chaque instant pour apprendre. Apprendre de la vie, apprendre des autres, apprendre de lui-même.

Apprendre à saisir chaque opportunité qui pourrait le mener sur le chemin de la vie.

C’est probablement l’optimisme qui poussera Christian à saisir les opportunités qui s’offrent à lui.

Lorsque quelqu’un réussit sa vie, on a tendance à dire qu’il a eu de la chance. Dans le cas de Christian Faison, il est impossible d’apporter un tel argument. Lorsqu’on connaît les évènements qui composent son enfance et son adolescence, il serait inconcevable de ne pas comprendre que la chance n’est pas un don de la nature mais un art de saisir la bonne opportunité au bon endroit, au bon moment. Il s’agit d’une capacité d’adaptation, d’une capacité d’optimisme même lorsque tout va mal. Savoir garder l’objectivité pour mieux observer, pour mieux comprendre que sa vie se décide à chaque instant, mais que le seul décideur, c’est soi-même.

 

II/ Un environnement familial

Son père, agent immobilier et assureur de profession l’abandonnera dès sa naissance. Il ne le verra que deux fois : une fois le soir de sa naissance, puis quelques années plus tard dans la rue, lui à pieds aux cotés de sa mère, son père au volant de sa voiture, prenant la fuite en le voyant.

Il découvrira, par hasard, l’existence d’un demi- frère. Après s’être assuré que son intuition était bonne, sa mère demanda au petit garçon qu’il venait de rencontrer et avec qui, il jouait de s’en aller et annonça à son fils qu’il s’agissait en fait de son demi-frère. Il ne le reverra jamais.

Sa mère n’ayant pas désiré cet enfant, reprochera à ce fils sa naissance, mais aussi sa masculinité, tout au long de sa vie allant jusqu’à lui imposer des vêtements féminins afin de combler le manque de cette fille qu’elle aurait voulu avoir.

Doté d’un orgueil sans réserve, cette misandre n’hésitera pas à travailler nuit et jour, infligeant le même  sort à son fils tout au long de son enfance et ce, jusqu’à sa majorité et plus.

C’est à l’âge de 7 ans que Christian rencontrera celui qui deviendra rapidement son beau père et qui lui donnera son nom avant de transformer sa vie en cauchemar.

Tantôt abandonné, tantôt battu et réduit à l’esclavage par sa propre famille. Christian prouvera plus tard que nous ne sommes pas obligés de reproduire indéfiniment le schéma de ses parents. Que nous pouvons apprendre l’amour paternel sans l’avoir reçu. L’hérédité de la violence n’est pas une excuse, encore moins une fatalité.

 

III/ Ses blessures, ses échecs.

 

Suite à l’abandon de son père, Christian Faison s’est retrouvé seul avec sa mère dans un « foyer pour jeunes femmes en détresse».

Puis, sa mère troqua son nouveau poste de manutentionnaire pour un emploi de femme d’entretien dans les immeubles HLM acquérant ainsi un logement de fonction à faible loyer. C’est ici que Christian creusa un peu plus sa peur de l’abandon.

En effet, pour assumer cet emploi, sa mère le laissait seul dans l’appartement. Il était donc livré à lui-même chaque jour, plongé dans le noir le plus complet, alors qu’il n’avait pas trois ans. Dans son lit à barreau, prisonnier de l’obscurité, il pouvait passer des heures à pleurer, complètement apeuré, sans que personne ne vienne le consoler.

Lorsque sa mère rentrait du travail et que Christian avait dérangé l’appartement, la punition était de lui mettre la tête dans le lavabo rempli d’eau froide jusqu’à suffocation.

Malgré son infinie solitude et les humiliations permanentes infligées par sa mère, Christian était un enfant plein de vie. Vrai bout en train à l’école, il ne connaissait que trop bien l’importance de la vie et de la liberté. L’école était pour lui son seul terrain de jeu où il pouvait enfin profiter de la présence d’individus qui plus est, de son âge. Il développa alors une soif d’apprentissage inextinguible. En effet, il voulait tellement apprendre des autres, de lui, de la vie dans ce paysage sans nuage apparent.

Malheureusement, ce n’est pas comme cela que le corps enseignant analysa la situation. Pour lui, Christian ne pensait qu’à s’amuser en se moquant bien de l’apprentissage.

C’est alors qu’il fut menacé de redoublement s’il ne rattrapait pas son retard de lecture.

Malgré ce manque d’attention parentale et ce surplus de violence, c’est à l’âge de 7 ans que tout a basculé pour le jeune Christian. En effet, c’est à cet âge qu’il rencontra pour la première fois celui qui deviendrait son bourreau durant trois longues années.

Après une courte période de séduction de la femme mais aussi de l’enfant ne donnant aucun indice sur la face cachée de cet homme, les deux tourtereaux finirent par se marié le 11 Décembre 1971 offrant par la même occasion le nom « Faison » à ce Christian jusqu’alors en recherche d’identité.

Le déménagement vers ce qu’il crût, l’espace d’un instant « la maison du bonheur » marqua ainsi le tercet du malheur.

A peine passé le pas de la porte, Christian reçu une vague de coups incompréhensible, inattendue, injustifiable. Mais ce qu’il ignore encore, c’est qu’il ne s’agit là que d’un avant goût de ce qu’il devra subir dans les mois, les années à venir. A partir de ce jour, il vivra dans la violence et la peur omniprésente. Tantôt battu, tantôt inquiet pour sa mère venant de recevoir les coups.

A partir de ce jour, les règles sont claires : si Christian ne veut pas connaître la pension, il devra, avec sa mère, se rendre utile et rapporter de l’argent à son père adoptif. C’est ainsi qu’ils deviendront tous deux, les esclaves de leur tortionnaire, forcés à travailler dans les champs jusqu’à douze heures par jour, ajoutant ainsi de nouvelles humiliations et douleurs à leur supplice déjà subi au sein du foyer familial.

Au-delà des coups, Christian survivra aussi aux tentatives de meurtre de son bourreau qui lui pointera, à plusieurs reprises, son fusil sur la tempe. Ici, il ne s’agit pas de menaces puisqu’il ira jusqu’à tirer, l’arme sauvant sa victime in extrémiste en s’enrayant.

C’est à la suite d’un énième coup de folie, d’une intensité plus importante qu’à l’accoutumé, que Christian et sa mère, trouveront la force de s’échapper.

La famille monoparentale se retrouve alors à la rue, terrorisée par l’idée que leur tortionnaire ne les surprenne.

Recueillis par le frère de son beau père, puis la sœur de sa mère, ils finiront chaque fois par être découverts par leur tortionnaire.

Ils logeront ensuite dans des appartements vétustes et qui le deviendront un peu plus chaque jour.

En effet, pour payer leurs loyers, Christian travaillera auprès de sa mère une douzaine d’heures par jour. Fragilisant encore un peu plus sa santé et ses chances de réussite à l’école qu’il doit allier à ses activités nocturnes. Leur principale activité étant la récupération, le tri et la vente de matériaux, leur appartement servira durant de nombreuses années de centre d’entreposage laissant juste la place pour circuler entre les déchets et dormir.

Beaucoup d’entre nous, en pleine force de l’âge, nous plaignons des 35 heures par semaine. Quelque soit la météo, quelques soit les dangers de la rue, de la nuit, Christian atteindra et renouvèlera ce quota tous les trois jours, sans parler de ses journées d’école qu’un garçon de dix ans se doit d’assumer parallèlement. Lorsque le week-end nous motive à nous réveiller chaque matin, lui pense au toit qu’il ne doit pas perdre pour tenir éveiller chaque soir.

 

IV/ Sa réussite.

La première réussite de Christian Faison est l’apprentissage de la lecture. Même s’il peut nous paraître simple, avec le recul, cela reste l’une des disciplines primordiales dont l’apprentissage peut s’avérer complexe, plus encore pour Christian qui ne pense, à cet âge, qu’à apprendre l’étymologie du bonheur.

Après n’avoir qu’à peine survolé les bancs de la classe, et suite à une menace de renvoi, Christian, aidée de sa cousine, appris à lire en 48 heures avec pour seule motivation le fait de récupérer sa petite voiture préférée, confisquée par cette dernière.

Sa seconde réussite, la plus importante à mon sens, est la survie.

En effet, il a survécu aux coups, à la sous-nutrition, à l’esclavage, à la mort, se réconfortant durant des années en pensant qu’ « il parait que c’est arrivé à d’autres ». Se rattachant à Dick, le chien de son beau père, pour panser ses blessures physiques et morales, après chaque torture, il découvrit vite que certains individus du règne animal, sont bien plus humains que certains êtres de l’espèce humaine.

Celui qu’il surnommera « Le Père Douceur », aura la lourde tâche de l’accompagner dans les soins et la purification de son âme lorsque la haine et le goût de la vengeance viendront s’immiscer aux cotés de son innocence enfantine. C’est lui qui lui apprendra le pardon qui lui permettra bien plus tard de ne garder aucune rancœur de son passé.

Comme lors de ces premières années d’école, Christian Faison, connaitra des difficultés tout au long de ses études. Troquant alors la joie de vivre de sa petite enfance contre le poids du travail nocturne, de la faim, de la fatigue et des douleurs. Contre le poids de la détresse…

Pourtant, malgré les réticences dictées par sa profonde pudeur, il finira toujours par saisir les mains tendues. C’est ainsi qu’il réussira, avec l’aide de frère Marcel, à maintenir le cap tant bien que mal.

Par la suite, l’accompagnement de son  professeur principal de troisième alliée à son courage  et sa détermination le mèneront à une moyenne générale de 16/20, à l’obtention du BEPC ainsi qu’au tableau d’honneur.

En parallèle, alors qu’il n’a que 17 ans, Christian postule dans une station service. Essuyant un premier refus, il ne s’avoue pas vaincu. Puisque l’équipe est au complet, il propose au patron de créer son propre service. Grâce à sa persévérance et son audace, il deviendra alors son propre chef en fournissant du carburant aux nouveaux clients de la nuit.

Alors que son service contribue largement au succès florissant de la société et à l’augmentation de son chiffre d’affaire, Christian rencontre un ancien camarade d’école qui se met alors en tête de l’attirer dans un nouveau monde professionnel.

Malgré de grosses hésitations engendrées par son manque de confiance en lui, Christian fini par accepter le contrat de trois mois que lui propose le patron de cette vieille connaissance. Il entame alors, non sans difficultés, son stage préparatoire d’assureur où il apprendra à franchir tous les obstacles se posant en travers de son chemin, accédant ainsi à un second, puis un troisième trimestre de formation. Il devient ainsi chargé de secteur dans la vente d’assurance vie. Métier qu’il devra concilier aux nombreux autres qu’il continue à exercer aux côtés de sa mère, le soir et les week-ends.

En Mars 1986, il s’inscrit à un cours de vente, afin de réaliser son rêve d’être un jour diplômé. Parmi une cinquantaine de participants, pour la plupart déjà surdiplômé, Christian comprendra vite l’importance de ce qu’il a appris des rencontres survenues durant toutes ses nuits de dur labeur. Il se rend compte que les diplômes ne sont rien comparés à la connaissance de l’être humain en lui-même. Dans la vente, rien ne vaut la qualité des relations humaines.

Il sortira diplômé de cette formation, terminant huitième de sa promotion.

Malgré les hauts et les bas qui ponctueront sa carrière d’assureur, Christian poursuivra une évolution hiérarchique exemplaire, devenant agent de Maitrise, chargé d’inspection en décembre 1994. Mais cet autodidacte n’en restera pas là puisqu’il finira, deux ans plus tard, Major de promotion, sur le plan régional, à l’examen d’inspecteur d’assurance avec la note de 16.58/20.

En 1988, plus serein professionnellement, il s’accordera enfin de penser à sa vie sentimentale. C’est alors qu’il rencontrera Sylvie, la femme qu’il épousera le 24 mars 1992 contre l’avis de sa mère qui voue une haine sans nom envers sa compagne.

Cette femme lui donnera par la suite deux enfants : son fils, Christopher, né en 1993, puis sa fille, Aurianne, née en 2000.

Son désespérant espoir qui l’a, dans un premier temps, tenu en vie, a fini par lui prouver, par nous prouver que tout est possible. Malgré son enfance, malgré les démons dont son passé l’accable, Christian a su renaitre de ses cendres pour devenir un homme debout.

On dit que l’espoir faire vivre et Christian en est la preuve vivante.

En effet, même s’il a été obligé de subir la vie pendant de nombreuses années, il a toujours espéré une vie meilleure. Sans cet espoir, il n’aurait probablement pas survécu au quart de ce qu’il a affronté au cours de son enfance et de son adolescence. Sans cet espoir, aucune reconstruction ne lui aurait été possible. Sans cet espoir, la vie lui aurait tout simplement été impossible.

On a tendance à ne voir que nos problèmes. A force de les regarder, on finit souvent par les agrandir jusqu’à réussir à nous convaincre que nous sommes les seuls à vivre ce genre de choses. Pourtant, il faut toujours garder en mémoire que d’autres avant nous on subit ce que nous sommes en train de subir et qu’ils y ont survécu. Evidemment, chaque situation diffère de quelques détails, mais ce qui fait réellement la différence est l’angle de vue auquel on décide de se substituer. Personne d’autre que nous ne peut espérer pour nous. Nous sommes la seule personne capable de nous relever même quand se sont les autres qui nous ont lâchement mit à Terre avant de nous piétiner jusqu’à épuisement

 

Si l’histoire de Christian Faison vous inspire, je vous invite à lire son auto-biographie « J’ai dix ans et ma vie est un cauchemar » ainsi que « J’ai choisi de vivre« . (Il s’agit de liens d’affiliations)

 

Et toi, de quelle manière te représentes-tu les failles de ton passé ?

Te souviens-tu avoir espérer des jours meilleurs ?

Penses-tu que la lumière peut se créer au plus profond des ténèbres sans la force électromagnétique qu’exerce l’homme sur son destin ?

2 réactions au sujet de « Biographie de Christian Faison (Un homme debout) »

  1. Je ne connaissais pas cet homme et son parcours. c’est un modèle de force, de courage et de persévérance face aux horribles épreuves qu’il a dû surmonter et ce dès le plus jeune âge ! son enfance a été terrible mais il a su garder foi en l’humanité et se construire son propre destin et pour ça, je dis chapeau !

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